C&H. I : Renouveau

Le Gardien Banabar entre dans la salle. Le chahut des jeunes initiés se tarit rapidement, alors que tout le monde reprends sa place. Mentor des plus gentils, tout le monde a appris à craindre les excès de sa froide colère. Un sourire satisfait apparait sur son visage, alors que l'holo-enregistrement se lance, emprisonnant sa personne, ses élèves et la séance du jour dans les archives.

Gardien Banabar:

Dans l’âge du vieil ordre, près de 50 ans après la disparition du premier Grand Maître de l’Ordre des Gardiens, Ilo Solitaire, les contestations se multipliaient sur l’ensemble des cités de Trinitea. Que cela soit sur la pittoresque Akua, croulant sous son manque d’entretien et d’intérêt, autant que la glaciale et terrible Central, rongée par les changements politiques, tout comme l’attractive et bienheureuse cité de Cap Blanc, agressée de nouveau par la menaces Gormak. Aucune d’elles ne parvint à garder sa population en place. Un âge sombre, de tension, de division, de scission.

Mais ne vous méprenez pas, s’il y a un facteur à blâmer sans peine ni restriction pour cela…
Ne cherchez guère plus loin, chers élèves, que la terrible autocratie des Gardiens, qui, sans Premier Maître faute d'unité, faisait peser sur le jeune état trinitéen des décisions aussi hasardeuses que folles.  Sans précédents, ces émotions civiles mutèrent en quelques occasions en des émeutes devant les différents temples de l’ordre, des insurrections, des rancunes ; alors tirez-en pour aujourd’hui les leçons qui doivent l’être, alors que je continue.

Ces terribles épisodes ont été porteurs d'un débat crucial au sein de l’assemblée des Gardiens alors Oubliés ; un débat qui façonna alors, il y a près d’un millénaire, l’essence de notre ordre autant que celle de notre société.
Il faut alors se plonger dans le contexte : le sens de l'urgence  et la peur de voir une insurrection émerger, une pouvant amener à la destitution de l’ordre en tant que tête de l’état trinitien, se faisait plus que douloureusement sentir dans l’ensemble des composantes de l’ordre ; alors que les factions très primitives des Gardiens se divisaient toujours plus en éternels débats. Des débats avait fini par jaillir la discorde… Et bientôt, bientôt le déchirement vint.
Deux parties se confrontaient alors idéologiquement, puis, en vinrent aux armes… L’Ordre était alors séparé en deux moitiés pratiquement égales, la première étant composée de ceux se voulant plus authentiques, plus vrai à la vision originelle, dépassée, des Gardiens Oubliés. Pour ces “loyalistes” conserver le pouvoir et réprimer les révoltes était à l’ordre du jour, quitte à user pour cela d’une indigne main de fer, quitte, en vérité, à prendre les armes contre leurs propres compatriotes. Ce groupe était alors emmené par diverses têtes dirigeantes de l’ordre, les reliques d’une ère dépassée… D’abord, le vieux Maître d'Illum Kléo, accompagné du fils du Maître Karrèz Oorend, nouvellement entré au conseil, décédé quelques années plus tôt. Ces deux acteurs commanditèrent au nom d’un âge révolu les plus grandes folies, si folles en réalité que l’histoire fit le choix de ne pas s’en souvenir, pas en détail en tout cas.
Mais voyez donc vers quoi la folie des uns peuvent mener un groupe aveugle et naïf, pensez, chers élèves, pensez car d'autres le feront à vôtre place.

Maître Kléo:

Opposé à eux la deuxième partie de l’Ordre, les réformateurs, étaient en quête d’unité, d’ordre et d’évolution ; le parti pris fut alors celui de Trinitea, de la nation, du tout. A la tête de ces derniers l’âgée Maître Maeliz Fungal du temple de Voss, la Conseillère Tiffélia et le Maître originel d'Horizon : Lusash Helaxand.

Maître Lusash Helaxand:

Pour ces derniers, l’ordre devait faire disparaitre sa poigne tyrannique de la société Trinitéenne, privant ce même Ordre d’une quelconque prépondérance politique.
Cherchant à inviter les parties civiles et militaires dans la gestion politique, ce groupe avait acquis le soutien de la nation Trinitéenne, qui se retournait contre les restes d’un ordre déjà fossilisé. Ces derniers, voyant leurs anciens frères tourner le dos aux principes de l’ordre, selon eux du moins, entreprirent l’exécution de tous les traîtres réformateurs, ce qui poussa une partie non-négligeable des indécis à se détourner du conflit… Parmi cette poignée effacée de Gardiens nous pouvons compter la légendaire championne de l’Ordre et Maître d'Aldérande : Miiala et son mari et Gardien Tohn, ainsi que la Gardienne Natu'ria "L'Ancienne".

Maître Miiala:

Ce conflit interne s’éternisa pendant de longues années, détruisant au passage les infrastructures trinitéenne qui avaient été bâties des années durantes. Tout fut balayé par l’orage de la guerre civile, si bien que les Réformateurs s’étaient exilés sur une planète que nous connaissons aujourd’hui tous comme étant notre planète-mère : Horizon ; tandis que les autres étaient constamment sur le pied de guerre, dans les étoiles… Illum n’étant alors, à ce moment de l’histoire, occupé que par ceux qui étaient restés neutres… Impossible de les en dissuader ou de les influencer d’ailleurs, car nul ne souhaitait réveiller le géant endormi.

Cela étant, malgré cette chasse brutale, que nous nommerons le Second Grand Schisme de l'Ordre des Gardiens, le parti réformateur émergea comme vainqueur, mais à quel prix. Il fallait désormais tout reconstruire, de l’Ordre à l’État... Alors, dans leur grande sagesse, nos pères fondateurs se montrèrent digne des promesses pour lesquelles des cohortes avaient perdues la vie, entamèrent une série de réformes aussi profondes que symboliques. Cette insigne de victoire fut présentée aux survivants sous un nom qui a demeuré jusqu’à aujourd’hui, jusqu’à vos oreilles, puisqu’il s’agit des « Grandes Réformes »…

Faisant notamment de l'État de Trinitea une nation dirigée par une assemblée représentative, constituée de Gardiens, de diplomates et politiciens, et de militaires gradés… Sous ce que nous connaissons aujourd’hui comme le Sénat Trinitéen.
Ces réformes marquent aussi la renaissance de l’Ordre des Gardiens, composé bien sûr des réformateurs, de certains loyalistes, désabusés, qui se livrèrent alors à la merci de nos pères fondateurs, dont la clémence fut de nouveau prouvée… ainsi que des indécis authentiques et neutres d’Illum…

Mais ces histoires sont celles d’un autre jour, puisque ces quelques mots concluent le récit du Second Grand Schisme de l'Ordre des Gardiens.

Les Temples: